Τετάρτη 26 Αυγούστου 2015

Αρθρο στη L'Obs

http://tempsreel.nouvelobs.com/la-crise-grecque/20150811.OBS3980/tryfon-alexiadis-des-pays-europeens-tentent-d-attirer-les-armateurs-grecs-chez-eux.html

Tryfon Alexiadis : "Des pays européens tentent d'attirer les armateurs grecs chez eux"

Pourquoi est-ce tellement difficile en Grèce de collecter l'impôt ? Réponse de Tryfon Alexiadis, ministre en charge du dossier. De notre correspondant à Athènes.

Entretien avec Tryfon Alexiadis, vice-ministre des Finances, en charge de la Fiscalité (ARIS MESSINIS / AFP)Entretien avec Tryfon Alexiadis, vice-ministre des Finances, en charge de la Fiscalité (ARIS MESSINIS / AFP)
Tryfon Alexiadis est le vice-ministre des Finances en charge de la Fiscalité depuis le 17 juillet et le remaniement du gouvernement d'Alexis Tsipras. Son profil est atypique. Président du Syndicat des agents du fisc pour Athènes et les Cyclades jusqu'à sa nomination, c'est un expert incontestable de la fiscalité grecque qui connait aussi parfaitement le fonctionnement du ministère des Finances pour y avoir travaillé pendant plus de 20 ans. Interview
Pourquoi est-ce tellement difficile en Grèce de collecter l'impôt ? 
- Tryfon Alexiadis : Pendant très longtemps en Grèce, il n'y avait aucune volonté politique de faire réellement marcher le système fiscal. Résultat direct, il n'y a jamais eu une vraie planification centrale pour collecter l'impôt. Cela, combiné à la collusion qui a longtemps existé entre les hommes politiques et les fraudeurs, grands ou petits, rendait la situation intenable.
Ce que je dis ici d'ailleurs n'est pas une analyse personnelle. Cela a été maintes fois dénoncé par des hommes politiques de tous bords : pour tout contribuable ayant des contacts politiques, les contrôles étaient très souvent interrompus après l'intervention de ces derniers, qu'ils soient ministres ou députés, du parti au pouvoir mais même, parfois, de l'opposition. La grande nouveauté aujourd'hui, c'est que pour les 5.300 contrôles effectués la semaine passée auprès d'entreprises du secteur touristique, je n'ai reçu aucun coup de fil demandant que j'intervienne pour protéger quelqu'un…
La semaine passée, sur l'île de Rhodes, des contrôleurs fiscaux ont été chassés manu militari par des commerçants et des citoyens. La défiance contre les services du fisc reste donc un problème majeur auquel vous allez être confronté vous aussi…
- Cette manière de fonctionner, c'est le début du fascisme. Le citoyen ne peut pas décider qu'il a le droit d'agresser des fonctionnaires qui font leur travail. Il peut manifester, il peut organiser des actions politiques pour communiquer ces idées et proposer des solutions, mais on ne peut pas aller plus loin. Les "révolutionnaires" de l'ile de Rhodes ne sont pas des combattants héroïques. Ce sont tout simplement des fraudeurs essayant d'échapper à un contrôle fiscal. D'ailleurs, il faut savoir que ce genre de violences envers les contrôleurs a commencé par les boites de nuits et leurs gros bras… Ces pratiques ne sont pas acceptables dans le cadre démocratique.
Rhodes n'est pas un cas isolé. Des actes similaires ont déjà eu lieu il y a quelques années, notamment sur l'ile d'Hydra.
- C'est vrai, et c'était bien évidemment tout aussi condamnable. Mais dans le passé, il y avait le sentiment que les contrôles ne concernaient que ceux qui n'avaient pas les bonnes connections politiques. Nous devons mettre fin à cette idée reçue, car désormais nos contrôles concernent tout le monde. La société grecque va s'en rendre compte très vite. D'ailleurs, ce combat contre la fraude fiscale et la contrebande ne pourra réussir que lorsque nous aurons la société avec nous… Les contrôles visant la contrebande de carburant ont déjà commencé, chose qui n'avait, malheureusement, jamais été faite jusqu'à maintenant ! Fin septembre, vous en verrez les résultats.
Comprenez bien : si le gouvernement d'Alexis Tsipras reste populaire, malgré toutes les difficultés, c'est parce que gens savent que les choses désormais sont très différentes.
Vous semblez très confiant. Mais êtes-vous certain que le gouvernement actuel restera en place assez longtemps pour accomplir ces changements ? L'accord qui va être signé avec les créanciers de la Grèce ne risque-t-il pas d'être fatal au gouvernement actuel et à Syriza ?
- La stabilité gouvernementale est dans les mains du groupe parlementaire de Syriza. Ils peuvent faire chuter le gouvernement à tout moment s'ils le désirent. Mais la majorité de ses députés c'est positionnée en faveur de l'accord que le gouvernement finalise en ce moment même avec les créanciers du pays. Une minorité importante a quant à elle une autre opinion. On verra bien.
Concernant l'accord, nous avons dû choisir entre une faillite violente et un retour forcé à la monnaie nationale. Cependant, au final, vous verrez : il sera bien meilleur que les accords précédents. Ceux qui prédisent que cet accord sera insoutenable et impossible à appliquer pour Syriza se trompent. Ce gouvernement comprend qu'il y a des limites pour la population et la société et il négocie en conséquence.
Au-delà des questions de volonté politique concernant la collecte de l'impôt et de la méfiance des citoyens grecs, le fisc grec est-il confronté à d'autres problèmes majeurs ?
- Nous n'avons pas le personnel nécessaire pour faire correctement notre travail. Selon une étude récente de l'OCDE, nous sommes très loin des moyennes européennes. Concrètement, en France, il y a un agent du fisc pour 550 habitants, en Allemagne un agent pour 725 habitants. Et en Grèce, seulement un agent pour 1.100…
De plus notre équipement informatique est complètement obsolète. La plupart de nos agences ont des ordinateurs datant de 2002 ou de 2003. Pire encore, aucun poste des douanes grecques ne possède une machine de contrôle aux rayons X pour pouvoir scanner et contrôler facilement les camions qui passent. L'Albanie, la Bulgarie, la Roumanie ont tous ce genre de machines à leur disposition. Evidemment, ces problèmes réduisent beaucoup notre efficacité.
Que comptez-vous faire concernant l'imposition de l'Eglise et des armateurs ?
- [sourire] On va demander l'aide de Dieu et appliquer la Constitution. La Constitution du pays prévoit deux choses : que les citoyens grecs doivent tous sans exception contribuer au trésor public et que cela doit se faire selon les possibilités de chacun. Tant l'Eglise que la marine marchande paieront ce qu'ils doivent payer.
Considérez-vous que l'Eglise et les armateurs doivent payer plus ?
- Dans les deux cas, il faut commencer un dialogue pour voir si réellement ils peuvent et doivent payer plus. Concernant l'Eglise en particulier, il faut bien comprendre qu'elle accompli aussi un grand travail social pour lequel elle coopère avec l'Etat. Quel intérêt pour l'Etat de l'imposer tellement qu'elle devra diminuer ses contributions envers les plus démunis ?
En ce qui concerne la marine marchande et donc les armateurs, nous avons déjà rencontré les représentants du secteur. Une discussion sur une hausse de leur imposition est à l'étude. Cependant, comprenez que la marine marchande est l'un des trois secteurs principaux de l'économie grecque, au même titre que le tourisme et la production agricole. Il faut donc faire attention : si une hausse d'impôts nuit réellement à leur compétitivité, non seulement on ne récupérera pas plus d'argent, mais on ne touchera même pas ce que l'état touche actuellement. Leur activité étant de toute façon extraterritoriale, il est très simple pour les armateurs de changer les pavillons de leurs navires et de s'installer dans un autre pays, peut-être même à l'intérieur de l'UE…
Vous considérez donc qu'il existe un problème de compétition intra-européenne concernant la fiscalité ?
- Οui, et tant qu'il y a des pays au sein de l'UE qui essayent d'attirer des entreprises en pratiquant le dumping fiscal, cela sera un problème majeur… Lors de nos récentes rencontres avec les armateurs, ceux-ci nous ont confié qu'ils reçoivent de nombreux coup fils de dignitaires d'autres gouvernements européens qui leur promettent des meilleures conditions s'ils y transfèrent leur siège social… Sans citer les pays concernés, au moment même où l'on nous met la pression pour les taxer plus, ce n'est pas normal.

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